Conformément à la volonté de Donald Trump, l’Afrique du Sud devrait prendre 30% de droits de douane américains supplémentaires à partir de vendredi 8 août. Si les négociations sont toujours en cours pour baisser ce taux, le pays se prépare à encaisser avec courage cette hausse. Pretoria a annoncé ouvrir un bureau d’aide aux exportateurs sud-africains et prévoit explorer de nouveaux marchés.
Donald Trump va tenir sa promesse. Après plus de trois mois de pause, le président américain compte bel et bien infliger des droits de douane supplémentaires à la plupart des pays du globe, même s’il se montre moins dur. Il a baissé les taux, sauf pour une poignée d’États. Parmi ceux-ci figure l’Afrique du Sud. La première économie du continent devrait prendre 30% de droits de douane dès le vendredi 8 août, contre 31% initialement prévus en avril dernier lors de l’annonce de ces mesures douanières punitives.
L’Afrique du Sud a échoué à amadouer Donald Trump
Au cours d’un point de presse à Johannesburg, lundi 4 août, le ministre du Commerce, de l’Industrie et de la Concurrence, Parks Tau, et le ministre sud-africain des Relations internationales et de la Coopération, Ronald Lamola, ont indiqué qu’aucun accord n’avait été trouvé pour l’heure, alors que l’Afrique du Sud a soumis sa proposition de cadre commercial en mai. Ce même jour, le président Cyril Ramaphosa a déclaré que « tous les canaux de communication restent ouverts pour dialoguer avec les États-Unis ».
Mais, à quelques jours de l’application des tarifs douaniers, on peut dire que la diplomatie sud-africaine a échoué à amadouer Donald Trump. Cet échec est d’autant cuisant que de nombreux pays ont réussi à alléger la note, notamment ceux de l’Union européenne, dont le taux initial a été divisé par deux, passant de 30 à 15 %.
L’opposition dénonce l’incapacité des négociateurs sud-africains
Pour les opposants au pouvoir de Pretoria, l’imposition des 30% à l’Afrique du Sud est le résultat de l’incompétence des dirigeants de l’ANC. Le parti Alliance démocratique, deuxième force politique au Parlement, et membre du gouvernement de coalition, blâme en particulier les négociateurs mandatés par Cyril Ramaphosa. Ceux-ci auraient étalé toute leur incapacité et leur négligence. « Ils ont manqué la date limite pour soumettre leurs propositions commerciales aux États-Unis et, après avoir dépassé cette échéance, ils ont été contraints de demander une extension, qu’ils ont aussi manquée », affirme Toby Chance, un membre d’Alliance démocratique.
Pretoria décrit un climat de négociation « difficile »
De son côté, le pouvoir se défend d’avoir fait tout son possible. Le ministre du commerce, Parks Tau, pointe un climat de négociation « difficile » et « inédit ». Il relève que les États-Unis ont beaucoup tardé à donner leur réponse à la première proposition de Pretoria, attendant jusqu’à deux jours avant l’échéance. Les Américains auraient ensuite ordonné aux négociateurs sud-africains de leur faire une offre, qui ne doit pas être « soumise à négociations ». C’est-à-dire « une offre présentant ce que l’Afrique du Sud est prête à donner » et non « ce que l’Afrique du Sud souhaiterait négocier en échange », assure Tau.
Donald Trump a une dent contre l’Afrique du Sud
Pour plusieurs officiels sud-africains, cette intransigeance des États-Unis est davantage motivée par des raisons politiques qu’économiques puisque les exportations Sud-africaines au pays de l’Oncle Sam n’entrent pas en concurrence avec les produits américains. On rappelle à juste titre que Donald Trump en veut à l’Afrique du Sud pour avoir porté des accusations de génocide contre Israël à la Cour internationale de justice (CIJ), à propos du conflit à Gaza.
Le président américain accuse également la première puissance d’Afrique de « génocide des Blancs » en raison de ses politiques de discrimination positives. C’est en grande partie Elon Musk, milliardaire américain blanc d’origine sud-africaine, qui a dressé Trump sur ce dernier dossier. Le locataire de la Maison Blanche applique une punition similaire au Brésil, en soutien à son ami Jair Bolsonaro, confronté à la justice brésilienne.
Les vignerons blancs seront les plus touchés
S’ils étaient effectivement appliqués, les nouveaux droits de douane américains pourraient faire baisser le produit intérieur brut de l’Afrique du Sud de 0,2 point de pourcentage et provoquer la perte de 100 000 emplois. Les Etats-Unis sont le troisième partenaire commercial de l’Afrique du Sud avec 7,5% du volume commercial total. Les exportateurs agricoles seront les plus touchés, notamment les vignerons et producteurs d’agrumes du Cap-Occidental. Pourtant il s’agit de fermiers blancs, que Donald Trump a promis de défendre contre une prétendue « oppression » du gouvernement sud-africain noir.
L’Afrique du Sud va se tourner vers d’autres marchés
Des économistes notent toutefois que de nombreux produits sont exemptés de ces nouveaux droits de douane, en particulier les minerais. « Ce sont de loin les exportations les plus importantes vers les États-Unis en termes de valeur », explique Dr Azar Jammine, directeur de l’entreprise de conseil Econometrix. Selon l’économiste, si on exclut ces matières, les exportations impactées ne représenteront au final qu’environ 2,5 % des exportations sud-africaines. Donc plus de peur que de mal ?
Qu’importe, Cyril Ramaphosa a annoncé lundi la mise en place d’un « Bureau de soutien à l’export », pour soutenir les producteurs dans leur quête de nouveaux débouchés. Il promet également de redoubler d’efforts dans les prochains mois pour développer de nouvelles relations commerciales, notamment avec l’Asie et l’Afrique.