Lors de la Journée mondiale de la Photographie, Abidjan a rendu un hommage au photographe panafricain Augustt Cornélius Azaglo. Au cours de cet évènement, qui célébrait aussi le centenaire de sa naissance (1924), les organisateurs ont évoqué son héritage aujourd’hui dispersé à travers le monde pour des expositions.
Dans le cadre de la Journée mondiale de la Photographie, des acteurs du monde de la culture se sont réunis à la Rotonde des Arts à Abidjan, en Côte d’Ivoire, pour visionner le film « Djaatala (preneur d’ombres) » de Dorris Haron Kasco consacré à Azaglo. Ils ont aussi et surtout rendu hommage au photographe disparu Augustt Cornélius Azaglo, en présence de membres de sa famille.
Cornélius Azaglo, un monument de la photographie ouest-africaine
A l’occasion de ce rendez-vous qui avait pour thème « La photographie, c’est de l’art », les intervenants ont évoqué l’héritage d’Augustt Cornélius Azaglo, 100 ans après sa naissance et 23 ans après son décès. Ils ont loué en lui « un monument de la photographie », qui a su s’imposer comme une personnalité majeure de l’histoire de son art en Afrique de l’ouest.
Doris Casco, photographe et cinéaste qui a réalisé un film sur cet artiste incontournable, a déclaré au micro de RFI Afrique que Cornélius Azaglo représente à lui tout seul les archives de la Côte d’Ivoire. Elle pointe la quantité et la qualité de ses portraits en noir et blanc, qui permettent aisément de retracer toute l’histoire de la terre d’Eburnie, surtout sa partie nord.
Il a capturé les premiers instants de la naissance de la Côte d’Ivoire
Doris Casco a rappelé le « travail tentaculaire » de Cornélius Azaglo, commencé avant l’indépendance du pays et qui a continué jusqu’en 2001. La cinéaste a rappelé notamment qu’il a sillonné les hameaux du nord de la Côte d’Ivoire pour photographier les gens en vue d’établir des pièces d’identité dans le cadre du recensement. Il a fait ce travail avec passion, ne songeant point à en tirer des avantages pécuniaires coûte que coûte.
Cornélius Azaglo aimait le travail bien fait
Son fils Kouamé Christian Augustt témoigne de cette passion dévorante, qui lui a fait souvent oublier que sa famille vivait de son travail. Il a confié que son père « ne mettait pas l’argent en avant », mais « plutôt le travail bien fait », « à tel point qu’à un moment donné, nous, ses enfants, on se demandait ce que nous allions devenir ! ». Mais aujourd’hui il est fier de ce que son géniteur a accompli de son vivant.
Ses pellicules aujourd’hui dispersées à travers le monde
Cornélius Azaglo a laissé en héritage plus de 101 000 négatifs cachetés et datés. Malheureusement ces pellicules, qui constituent la mémoire vive de la Côte d’Ivoire, sont aujourd’hui dispersées à travers le monde pour des expositions, sans un espoir de retour. « S’ils revenaient en Côte d’Ivoire, ces clichés pourraient venir enrichir les collections des musées nationaux ou servir de base à la création d’un centre d’archives photographique », regrette le photographe Seibou Traoré.
Cornélius Azaglo a vécu dans plusieurs pays d’Afrique de l’ouest
Né en 1924 à Kpalémé (Togo), Cornélius Azaglo a été confié à des membres de sa famille résidant au Ghana, après le décès de son père en 1929. C’est dans ce pays anglophone qu’il obtient son certificat d’études en 1944, avant d’exercer différents métiers, tout en pratiquant la photographie en amateur pendant ses temps libres. Mais c’est en 1950, au Burkina-Faso, où il rejoint un grand frère, que Cornélius s’initie véritablement à sa passion, en studio et dans la rue avec un box-camera.
Le photographe est décédé à Bouaké en 2021
En 1955, le jeune Azaglo part pour Korhogo (Côte d’Ivoire), où il ouvre un studio trois ans plus tard, après avoir gagné suffisamment de sous. Il connaîtra un grand succès, à une époque où la photographie vivait son âge d’or sur le continent. Cependant, la démocratisation du métier, puis l’ouverture des premiers laboratoires couleurs entraînent sa chute et celle de son métier dans les années 80. Heureusement, l’homme avait amassé suffisamment d’argent pour mener une vie paisible jusqu’à sa mort à Bouaké, en 2001, des suites d’une courte maladie.