L’agence Moody’s a dégradé lundi la note souveraine du Kenya, la faisant passer de « B3 » à « Caa1 ». Cette notation, qui s’accompagne d’une perspective négative, est une réponse au retrait du projet de loi des finances par le président William Ruto, sous la pression de la jeunesse.
Moody’s a dégradé, le lundi 8 juillet 2024, la note de crédit du Kenya. Elle l’a fait passer de « B3 » à « Caa1 », avec une perspective négative. L’agence de notation justifie sa décision par la reculade du président William Ruto sur son projet de loi des finances, après d’importantes manifestations antigouvernementales en juin.
Au Kenya, de violentes manifestations contre le projet de loi de finances
Pour rappel, le Kenya a été secoué le mois dernier par de violentes manifestations contre le projet de loi de finances 2024. Ce texte comprend des mesures fiscales impopulaires telles que l’instauration d’une TVA de 16 % sur le pain et une taxe annuelle de 2,5 % sur les véhicules à moteur. Pour l’Etat, ces mesures sont nécessaires pour financer son ambitieux budget 2024-25 fixé à 4 000 milliards de shillings (29 milliards d’euros).
Une trentaine de morts enregistrés par les ONG
Mais les jeunes Kenyans n’entendaient pas laisser passer une telle initiative, alors que le gouvernement avait déjà augmenté l’an dernier l’impôt sur le revenu et doublé la TVA sur l’essence. Estimant que William Ruto a manqué à ses promesses électorales, ils ont brutalement occupé le Parlement, le 26 juin. Les affrontements avec la police ont fait une trentaine de morts, selon les ONG des droits de l’Homme. Malgré ces drames, la mobilisation s’est poursuivie, s’appuyant sur la force des réseaux sociaux.
Les mesures alternatives ne convainquent pas Moody’s
Face à la pression des manifestants et aux critiques de la communauté internationale, William Ruto a dû suspendre son projet de loi de finances 2024. Pour compenser cette décision, le président kenyan a annoncé, le 5 juillet, des mesures alternatives comme des coupes budgétaires de 177 milliards de shillings (1,3 milliard d’euros). Cette reculade ne plaît pas aux marchés et aux institutions internationales telles que le FMI, qui exige une réduction de son déficit.
Le retrait du projet de loi nuira au plan de réduction de la dette publique du Kenya
Moody’s, en particulier, pense que la nouvelle stratégie de l’Etat impactera « négativement les trajectoires fiscales et les besoins de financement du Kenya ». Elle ralentirait le plan de réduction de la dette publique en raison de l’augmentation des paiements d’intérêt. Aussi, l’agence de notation estime que des déficits budgétaires plus importants provoqueraient une hausse des besoins d’emprunt et les risques de liquidité.
Les jeunes demandent maintenant le départ de Ruto
Si Moody’s admet que l’abrogation du projet de loi de finances 2024 a calmé les jeunes, l’agence reste conscience que Ruto n’a pas encore gagné la partie. En effet, la population ne conteste plus seulement la politique budgétaire du gouvernement. Maintenant, elle demande aussi au président de démissionner à travers le slogan « Ruto must go » (« Ruto doit partir »). Dans ce contexte de tensions sociales accrues, Moody’s dit ne pas s’attendre à ce que l’exécutif soit en mesure d’atteindre ses objectifs de recettes.