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Archives déclassifiées sur l’assassinat de Martin Luther King, un écran de fumée ?

Le lundi 21 juillet, l’administration Trump a rendu publiques plus de 230 000 archives sur l’assassinat de Martin Luther King en avril 1968. Ces documents portent notamment sur l’enquête du FBI, la traque internationale de l’assassin présumé et le témoignage d’un de ses codétenus. Mais la famille du défenseur des droits civiques et des observateurs n’attendent rien de ce geste. Ils pensent même qu’il s’agit d’un écran de fumée pour faire oublier l’affaire Epstein, qui éclabousse le président américain.

C’était très attendu. L’administration Trump a rendu publiques, le lundi 21 juillet, plus de 230 000 pages d’archives sur l’assassinat de Martin Luther King, tué le 4 avril 1968 sur le balcon d’un motel de Memphis. Mais cette déclassification des documents n’a pas obtenu l’effet escompté sur les partisans du président américain, comme c’était le cas avec les dossiers concernant les frères Kennedy.

Les archives sur Martin Luther King déclassifiées après celles des frères Kennedy

Sur la base de ses promesses de campagne, Donald Trump avait ordonné par décret, le 23 janvier 2025, la déclassification des archives gouvernementales sur l’assassinat du président John Fitzgerald Kennedy en 1963, qui fait l’objet de théories du complot, ainsi que sur les meurtres de son frère Bobby Kennedy et de Martin Luther King Jr en 1968. En mars, les Archives nationales ont rendu publics de nouveaux documents classifiés concernant le président John F. Kennedy. Un mois plus tard, l’organisme en a fait de même pour son frère, père de l’actuel ministre de la Santé, Robert Kennedy Jr, et ministre de la Justice du président démocrate assassiné.

Le témoignage d’un de ses codétenus du présumé assassin

Les documents publiés lundi par l’administration Trump portent notamment sur l’enquête du FBI, la traque internationale de l’assassin présumé de Martin Luther King – James Earl Ray – ou encore sur le témoignage d’un de ses codétenus. Certaines pages mentionnent des demandes faites par divers agents fédéraux (notamment des membres de la CIA) de consulter un document ou une photo, ou de ne pas détruire les dossiers entourant la mort du révérend.

Un extrait d’interrogatoire du frère du principal suspect

Ces 230 000 pages comprennent aussi des articles de presse et des résumés de publications parues à l’étranger au sujet de la mort du militant noir. On y trouve en outre un fichier audio, un extrait d’interrogatoire du frère du principal suspect, qui ne croit d’ailleurs pas à la culpabilité de James Earl Ray. Dans un communiqué accompagnant la publication des archives, la directrice du renseignement national américain, Tulsi Gabbard affirme que les Etats-Unis « assurent une complète transparence sur cet événement tragique et décisif dans l’histoire du pays ». Mais personne n’y croit vraiment.

Martin Luther King victime d’une « campagne de désinformation »

Après l’annonce de la déclassification des archives concernant Martin Luther King, les enfants de celui-ci ont exprimé leurs inquiétudes dans un communiqué. Ils disent craindre un possible détournement de cette publication pour « attaquer sa postérité ou les réalisations du mouvement » des droits civiques. « Nous demandons à ceux qui vont découvrir ces dossiers de le faire avec empathie, retenue et respect pour le deuil que continue à ressentir notre famille », ont-ils prié. De son vivant, Martin Luther King avait été victime d’une « campagne de désinformation et de surveillance » orchestrée par le directeur du FBI de l’époque, le puissant John Edgar Hoover. Cette manœuvre visait à « discréditer sa réputation et plus généralement celle du mouvement pour les droits civiques », rappelle la famille du pasteur.

Remise en cause de la culpabilité réelle de James Earl Ray dans l’assassinat de Martin Luther King

Par ailleurs, les enfants de Martin Luther King disent ne pas croire à la culpabilité de James Earl Ray. Le 4 avril 1968, ce ségrégationniste blanc a tiré sur Martin Luther King, qui se tenait au balcon d’un motel de Memphis (Sud) où il était venu soutenir des éboueurs en grève. Le meurtrier est mort en prison en 1998. Si c’est bien lui qui a tiré, certaines théories suggèrent qu’il n’était qu’un exécutant, comme Lee Harvey Oswald, l’assassin de John Kennedy, dont la culpabilité est encore enveloppée de doute (on ne sait pas si c’est vraiment lui qui a tiré, vu la trajectoire des balles).

Scepticisme des historiens sur cette declassification 

Le professeur Larry J. Sabato, directeur du Centre politique de l’université de Virginie, partage les doutes de la famille de Martin Luther King. Interrogé par le New York Times, il s’est dit très « sceptique » sur tout ce qui provient du FBI. L’universitaire accuse les agents de l’époque d’avoir exagéré, voire créé des preuves contre le militant noir, pour plaire à leur tout-puissant patron Hoover qui cherchait à salir l’image du révérend. Plusieurs historiens n’ont pas, pour l’heure, trouvé grand-chose dans ces nombreux documents publiés lundi. Certaines archives demeurent d’ailleurs classifiées jusqu’en 2027 au moins (si les autorités acceptent bien sûr de les publier). La vérité s’y trouve peut-être…

La déclassification des archives de Martin Luther King, une manœuvre pour faire oublier l’affaire Epstein qui éclabousse Donald Trump ?

Notons que cette déclassification des documents sur le dossier Martin Luther King intervient alors que Donald Trump est critiqué par une partie de sa base MAGA pour son supposé manque de transparence dans l’affaire Epstein. En août 2019, ce financier et prédateur sexuel a été retrouvé pendu dans sa cellule de prison, où il purgeait une peine pour des accusations de traite sexuelle.

Le président américain était un grand ami de cet homme d’affaires. Il lui aurait même envoyé une note salace à l’occasion de son anniversaire en 2004. La décision de déclassifier les archives de l’assassinat de Martin Luther King est donc interprétée comme une tentative de faire diversion. Les enfants du pasteur croient avoir bien senti le coup. « Et maintenant, publiez les ‘Epstein files’ », a écrit Bernice King, la fille de Martin Luther King, sur X.

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