En République démocratique du Congo (RDC) plusieurs jeunes délinquants ont été condamnés à la peine de morts. Le ministre de la justice, Constant Mutamba, justifie ces décisions par l’impérieuse nécessité de briser la spirale de violence qui trouble la quiétude des Congolais. Mais les ONG de défense des droits de l’Homme demandent la suspension des projets d’exécution.
En République démocratique du Congo (RDC), la justice a récemment condamné près de 150 jeunes délinquants à la peine de morts pour diverses infractions. Notamment pour meurtre, association de malfaiteurs et vols à mains armées. Ces délits sont punis de la peine de mort en RDC.
La peine de mort jusqu’ici réservée aux militaires en RDC
Abolie en 1981, puis réinstaurée en 2006, la peine de mort en République démocratique du Congo a été longtemps réservée aux infractions graves commises par des militaires, notamment la trahison ou défection. Plusieurs soldats ont été exécutés ces dernières années, alors que la rébellion du M23 accentuait sa pression sur l’armée congolaise dans l’est du pays.
Les « kuluna », de grands bandits urbains
La décision récente d’élargir l’application de la peine de mort aux civils marque un tournant. Elle témoigne de la volonté de l’Etat de briser la spirale de violence installée par des gangs et des bandes de jeunes délinquants appelés « Kuluna ». En Lingala (langue majoritairement parlée en RDC). Ce terme renvoie au « grand banditisme urbain ». Il désigne les jeunes gens organisés en bande de hors-la-loi, incontrôlables qui passent leur temps à voler et faire du mal aux autres.
Des « kuluna » en RDC, des « microbes » en Côte d’Ivoire
Pour commettre leurs forfaits, les « kuluna » utilisent des armes blanches, généralement des machettes, couteaux et pierres. Ces jeunes délinquants existent aussi en Côte d’Ivoire , où on les appelle péjorativement des « microbes » . Dans ce pays, le gouvernement préfère l’emploi de l’euphémisme « enfants en conflit avec la loi ». Lorsque la population les attrape, la justice populaire s’applique (battus à mort ou brûlés vifs). Mais quand c’est la police qui les arrête, ils ont un meilleur sort. On les envoie dans des camps de rééducation.
Les autorités congolaises ne veulent pas s’encombrer de centres de rééducation et de réinsertion
En RDC, rien de tel. Les jeunes délinquants sont transférés pour la plupart dans des prisons de haute sécurité, principalement à Angenga, un centre pénitentiaire situé au nord-ouest du pays. Les conditions d’incarcération sont exécrables. Des dizaines de détenus y sont morts de faim et de maladies par le passé. Les ONG de défense des droits de l’Homme s’inquiètent donc pour les kuluna.
Près de 150 kuluna condamnés à mort sur 300 jugés
Amnesty International, notamment, a appelé au strict respect des droits des prisonniers. Mieux, l’organisation demande aux autorités de la RDC d’arrêter les projets d’exécution massive. Au moins 147 kuluna ont été condamnés à mort sur les 300 jugés ces dernières semaines, lors d’audiences foraines retransmise à la télévision nationale. Les autres ont pris des peines de prison allant de 5 à 20 ans.
Des habitants plus en sécurité depuis l’arrestation de plusieurs kuluna
Les kuluna ont été interpellés lors de l’opération « Ndobo » (l’hameçon), lancée par le gouvernement pour endiguer le fléau. Grâce à ce coup de filet, les Congolais ont pu fêter dans la quiétude, une première fois depuis plusieurs années. Ils en remercient d’ailleurs le gouvernement. Depuis ces arrestations, le banditisme a fortement diminué, notamment à Kinshasa, Kinsangani, Goma et Bukavu.
Le ministre de la Justice de la RDC veut envoyer un message de fermeté
Répondant aux inquiétudes des ONG, le ministre de la Justice, Constant Mutamba, a déclaré que la procédure judiciaire se fait dans la transparence totale et selon la loi congolaise. Aussi, il a justifié les exécutions par la nécessité d’envoyer un message de fermeté. Selon lui, la plupart de ces jeunes sont des récidivistes qui ont déjà fait à plusieurs reprises la prison. Il ne servirait donc à rien de les emprisonner simplement puisqu’ils recommenceront dès leur sortie.
Les autorités de la RDC appelées à lutter contre le chômage des jeunes
Constant Mutamba précise toutefois que les kuluna condamnés à la peine de mort ou d’emprisonnement conservent le droit de faire appel des décisions de justice. Mais pour les défenseurs des droits de l’Homme toutes ces condamnations à mort n’ont aucun sens. Au lieu d’ôter la vie de ces jeunes gens, ils conseillent au gouvernement d’investir dans l’éducation et l’emploi car les kuluna sont pour la plupart des désœuvrés.