La CEDEAO a infligé la semaine dernière de sévères sanctions au Mali pour punir la junte de ne pas avoir tenu ses engagements quant à l’organisation d’élections générales en février prochain. Alors qu’elle s’attendait à voir le pays en souffrir tout seul, l’organisation sous-régionale constate un effet domino sur les Etats voisins, dont la Côte d’Ivoire et le Sénégal.
Une prolongation de la transition de cinq ans
La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a pris, le 9 janvier dernier, une série de mesures punitives contre la transition malienne pour ne pas avoir respecté le calendrier électoral. En effet, en décembre dernier, elle a obtenu une rallonge de cinq ans lors des Assisses nationales. Pourtant, il était prévu de longue date que les élections générales, en particulier la présidentielle, aient lieu en février 2022. C’était la condition principale posée par la Communauté internationale pour lever la suspension de ses aides financières et autres. Malheureusement, Bamako a son propre agenda et n’entend recevoir d’ordre de personne. Il s’est ainsi engagé dans un bras de fer, qui a abouti aux sanctions d’Accra.
La CEDEAO a notamment décidé de fermer ses frontières avec le Mali, de retirer les ambassadeurs de tous ses pays membres, de geler les avoirs maliens au sein de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et de suspendre les transactions avec cet Etat. Des décisions jugées « illégales » et « illégitimes » par Bamako. La population dénonce également un acharnement sur le Mali et accuse les chefs d’Etat ouest-africains d’être des marionnettes de Paris. Qu’à cela ne tienne, les sanctions ont commencé à faire leurs effets. Pays enclavé, le Mali n’a plus accès à la mer, ou plus précisément aux deux grands ports de la région que sont Dakar et Abidjan, pour ses échanges commerciaux.
Les transferts de la diaspora, une manne essentielle
Plusieurs centaines des transporteurs sont ainsi bloqués aux différentes frontières. Ce qui fait craindre une pénurie de produits essentiels, dont le ciment, le fer, le matériel informatique, les équipements électro-ménagers ou encore les voitures importées. Par conséauent, il y a risque d’une inflation si la situation perdure. Heureusement, les produits de première nécessité tels que la nourriture, le carburant ou les médicaments ne sont pas concernés par les sanctions de la CEDEAO. Une exception qui ne pèsera pas beaucoup dans la balance, en raison du gel des avoirs de l’État ainsi que la suspension des financements de la banque centrale vers le Mali. Ces mesures risquent d’entraîner un défaut de liquidités et de paiement.
Par ailleurs, les familles maliennes devraient souffrir de la suspension des transactions vers leur pays. Le Mali vivant en grande partie des transferts de la diaspora, qui représentent environ 7 % du PIB national. Cet argent vient essentiellement de la France et de la Côte d’Ivoire, où vivent 3 millions de Maliens. Soit la plus forte communauté à l’étranger. Cette diaspora produit 150 milliards de francs CFA par an. Une manne conséquente donc pour le pays et pour les habitants. Mais le Mali pourrait esquisser un sourire narquois au coin des lèvres.
Les commerçants maugréent en Côte d’Ivoire
En effet, ses principaux partenaires que sont le Sénégal et la Côte d’Ivoire paieront aussi le prix fort des sanctions de la CEDEAO. L’embargo décrété par l’organisme sous-régional rognera leurs économiques car les privant des exportations maliennes, dont le coton, l’or et le bétail. En Côte d’Ivoire, notamment, les commerçants de gros et fournisseurs se plaignent déjà de la perte de leurs clients maliens. Et les ménages ivoiriens pourraient bientôt être confrontés à une augmentation du kilo de la viande. Quant au Sénégal, ses importations ont fortement fondu ces derniers jours. Certains pays renégocieraient déjà avec le Mali, en catimini, à la suite de la compagnie Air France qui a repris sa desserte…